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Fragments

Clément Paradis

Docteur en esthétique, historien de l’art et de la photographie avec un penchant pour la littérature et la culture olfactive.
Photographe, fondateur de Timeshow Press. Prête sa plume à Nez, la revue olfactive.

En tant qu’auteur et photographe, mes créations tiennent une place importante dans ma recherche, me permettant de penser conjointement théorie et pratique. Dans une démarche d’expérimentation, j’ai élaboré des œuvres de différentes natures, qui ont fait l’objet d’une vingtaine d’expositions en France et à l’étranger, notamment au festival Voies Off d’Arles et à la Gallery Niépce à Tokyo.
Si mon travail artistique s’est principalement développé autour de deux médiums entremêlés (la photographie, indifféremment argentique ou numérique, et le livre), il se construit comme une réflexion aux abords de deux notions qui s’affrontent pour moi tout au long de l’histoire de la photographie : la description et la narration. Alors que les capacités descriptives de ces images ont fasciné à la fois les scientifiques et les journalistes, leurs aptitudes narratives n’échappèrent pas aux artistes, aux documentaristes, mais aussi à toute une sphère marchande percevant la force rhétorique de la photographie lorsqu’elle est ressaisie par un dispositif adéquat.
C’est aujourd’hui cet acte de « ressaisissement » que j’explore, étudie et tâche de démystifier en créant des livres d’artiste et dispositifs d’exposition à même de modaliser ou « neutraliser » la séduction descriptive des images, et ainsi penser des degrés de mise à distance de la photographie. Le livre et l’édition sont donc les moments nécessaires permettant de donner du sens au chaos de l’archive photographique. Les éditions, travaillées en petites séries de 8 à 100 exemplaires, parfois aussi comme des pièces uniques, deviennent alors des mondes organisés. À travers l’emploi d’images pauvres, l’alternance du noir et blanc et de la couleur, des matériaux éditoriaux modestes ou luxueux, connotant des lectures expéditives (comme le papier bouffant) ou attentives (comme le papier photo), je m’emploie aussi à décaler la narration, à rendre palpable pour le lecteur la production de sens à laquelle il participe.
Ces travaux prennent donc acte des instrumentalisations variées de la photographie dans l’espace public et médiatique, et cherchent à matérialiser la confusion dans le temps et l’espace que la photographie a introduit dans l’histoire des représentations en même temps qu’elle permettait les observations les plus fines.